mardi 12 mai 2015

Pourquoi l'un des principaux experts de politique étrangère russe redoute une guerre majeure avec l'Europe (Partie 2)

Le Tu-95, bombardier russe à long rayon d'action, l'un des types d'avions qui a été vu dans ou près de l'espace aérien de l'OTAN durant les derniers mois, ce qui est vu par les gouvernements occidentaux comme une dangereuse provocation (Wojtek Laski / Getty)
Voici la deuxième partie de l'entretien avec Fedor Loukianov réalisé par le journaliste américain Max Fisher, rédacteur en chef du site Vox, et Amanda Taub, et publié le 5 mai 2015. (Voir la 1ere partie)

Fedor Loukianov est le rédacteur en chef de la revue Russia in Global Affairs et président du Conseil de politique étrangère et de défense russe. Loukianov est l'un des experts de politique étrangère les plus influents et les mieux informés de Russie. Il est largement considéré comme reflétant la position de politique étrangère officielle de l'establishment russe.
 
La peur, la tension, et la mauvaise communication entre la Russie et l'OTAN

Max Fisher: Permettez-moi de vous questionner à propos de l'OTAN. Il y a des discussion à propos des mesures considérées pour intégrer la Suède ou peut-être même la Finlande à l'OTAN. Comment sont perçus ces discussions ici, à Moscou, et quelles seraient les conséquences si réellement des mesures étaient prises en ce sens ?

Fedor Loukianov: C'est très mal perçu. L'OTAN est de retour comme principale menace symbolique. La Suède est particulièrement active dans le rétablissement de cette vieille politique [dépeignant une] menace russe. La Finlande moins, mais avec le même genre de perception.

Ce qui se passe aujourd'hui en Europe du Nord et dans les pays baltes est très regrettable et dangereux. Ce n'est pas le but de la Russie, comme beaucoup le croient dans l'Ouest, de prendre les États baltes ou de tester l'article V [la disposition de l'OTAN pour l'auto-défense mutuelle, dans laquelle tous les États membres viendraient à l'aide d'un allié attaqué] . Je ne pense pas que ce soit l'objectif de la direction russe.

Le problème est que depuis la guerre froide, tous les mécanismes qui permettaient de prendre l'autre au sérieux et de disposer des moyens pour contrôler les dommages, tous ces mécanismes ont été perturbés ou érodés.

Max Fisher: Qu'entendez-vous par des mécanismes?

Fedor Loukianov: Les lignes de Téléphone rouge entre les chefs d'états-majors, pour communiquer. Des mécanismes pour convenir où nos avions peuvent aller ou pas et où vont aller les vôtres.

Je veux dire la vaste infrastructure de la guerre froide vaste qui a été développé, après la crise des missiles cubains en particulier, afin de gérer l'hostilité. Parce qu'ils avaient compris qu'ils étaient tenus d'être des adversaires, mais que des mesures étaient nécessaires pour éviter les collisions mortelles. Pour avoir une guerre par procuration en Afghanistan ou ailleurs, d'être extrêmement prudent avec les sous-marins équipés de missiles nucléaires qui se côtoient le long des côtes des uns et des autres, c'est important. Et cela s'est dégradé depuis la fin de la guerre froide parce que la perception commune était que nous n'en avions plus besoin. Malheureusement, c'est de retour, mais nous avons besoin de rétablir des mécanismes.

Qu'est-ce qui se passe dans les régions de la Baltique et en Europe du Nord, toutes ces affirmations sur des avions russes dont les transpondeurs sont éteints et ainsi de suite, il est très difficile de savoir qui ment ou pas. Les deux camps sont, sinon des menteurs, du moins coupables de beaucoup d'omissions. Comme une personnalité majeure me l'a dit, bien sûr que nous éteignons nos transpondeurs, c'est une chose normale, ils ont besoin de tester différentes options pour l'exercice de ce qu'ils doivent exercer. Mais il y a un problème de communication et d'entente. Comment le faisons-nous? Que pouvez-vous attendre que nous allons faire ou pas ?

Malheureusement, les pays baltes sont devenus une pièce maîtresse pour cela, pour des raisons compréhensibles. Les Etats baltes sont particulièrement préoccupés, voire terrifiés, par ce qui se passe. Ils veulent que l'OTAN soit physiquement là en cas d'urgence. Fondamentalement, le problème est qu'ils ne font pas confiance à l'OTAN; ils n'ont confiance que dans les américains. Ils ne font pas confiance à leurs alliés européens, en raison de leurs expériences historiques. Ils ont peur que dans le cas d'une situation d'urgence, leurs amis allemands leur dise : "Désolé, nous ne pouvons pas vous protéger maintenant; la prochaine fois."

Rassurer les Etats baltes est une des tâches les plus importantes pour l'OTAN. Voilà pourquoi tant d'activités militaires se produisent dans ce domaine. La Russie réagit à cela parce que la Russie le perçoit comme une approche hostile de la frontière russe. Et c'est un cercle vicieux.

Max Fisher: Y a t-il des domaines spécifiques ou déclencheurs qui vous inquiètent car ils pourraient conduire à de dangereux malentendus?

Fedor Loukianov: Sans qu'il n'y ait aucune intention de créer le grand conflit, il peut arriver. Un pas, un autre pas, et le principe de réciprocité peut devenir très dangereux. Supposons qu'un avion russe soit très proche d'une zone que l'OTAN croit être interdite alors que la Russie estime qu'elle ne l'est pas, et qu'un avion britannique réponde. Cela pourrait être gérable, et dans la plupart des cas, bien sûr, cela le serait, mais qui sait ?

Amanda Taub: Il y a une perception aux États-Unis que l'un des dangers des actions russes est qu'il serait politiquement avantageux pour Poutine d'être considéré comme agressif. Ils regardent ce qui est arrivé en Ukraine, et ils voient que ça a vraiment aidé sa popularité dans le pays. Donc, il y a une crainte que la Russie pourrait être tentée de faire quelque chose comme ça.

Fedor Loukianov: Je me souviens d'un grand nombre de conversations en 2000 avec de nombreux américains et européens sur l'élargissement de l'OTAN.

Je leur ai dit qu'il y avait beaucoup de risques devant nous, surtout si l'Ukraine était invitée dans l'OTAN. L'argument que j'ai entendu plusieurs fois cité était la Pologne. Lorsque la Pologne voulait adhérer à l'OTAN, la Russie s'y est opposé à plusieurs reprises, mais l'a finalement pacifiquement accepté. La Lituanie a voulu la rejoindre, et il en a été de même. [Les Américains et les Européens] ont dit que ce serait la même histoire avec l'Ukraine.

J'ai essayé de les convaincre qu'elle ne serait pas la même parce que l'Ukraine est complètement différente pour la Russie - elle est considérée par beaucoup de gens comme quelque chose qui est en fait une partie de notre pays, ou s'il ne fait pas partie de notre pays, alors un pays qui est absolument essentiel pour la sécurité de la Russie. Si vous essayez [d'intégrer l'Ukraine dans l'OTAN], cela pourrait être très mauvais. Je n'ai pas constaté beaucoup de compréhension pour cet argument. Je pense que M. Poutine a déclaré a peu près la même chose en 2008 au président George Bush lors de leur célèbre sommet de Bucarest. Le message était fondamentalement, "Ne touchez pas à l'Ukraine. Si vous ne la touchez pas, nous n'y touchons pas." (...)

(suite à paraitre bientôt dans la partie 3) (Voir la partie 1)
Source : VOX
(Trad : Bertrand)

Une autre partie de l'entretien (au sujet des relations Russie-US) traduite par le site Dedefensa:
Interview de Fédor Loukianov : “Hillary est la pire option”

1 commentaire:

  1. Ce message leur donne raison et dit qu'il est trop tard pour qu'on y fasse quoi qu'il en soit :

    « Nous entrons dans le temps de la fin. L’explosion générale voulue par les hommes et non par les dieux. Tout s’écroule et c’est Nécessité si vous voulez avoir un espoir de futur sur la Terre. Au rythme où vont les destructions, il n’y aura plus de Terre avant trois ans.
    Nous stoppons tout là maintenant.
    Le monde entre dans une phase de chaos courte et intense, ne laissant rien qui puisse nuire au futur de la Terre. Attendez-vous au pire. Nous l’avons assez dit.
    Du pire naîtra le meilleur : la Nouvelle humanité, le futur Juste.
    ... en plein dans la guerre, afin de la stopper net. ... la Victoire est déjà en cours.
    Les hommes ont choisi leur camp.
    Il n’y aura pas de retour en arrière. Les hommes assumeront leurs actes. Ils ont eu le temps de choisir leur camp.
    Préparez-vous à la lutte sans merci.
    Nous entrons dans la Résolution définitive des conflits et la Construction du monde Nouveau : la Nouvelle Ère, la Nouvelle Civilisation, la Nouvelle humanité.
    ... C’est le temps de la Victoire des Justes, le triomphe du Plan divin. La lutte acharnée va prendre fin, le temps d’une Lune.
    ... Dans le Grand Nettoyage aujourd’hui : le Temps Nouveau. » Clefsdufutur-12.05.2015

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